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Le 4 février 2025 marque une étape importante dans l'engagement des jeunes haïtiens en faveur du changement : le lancement officiel du Club de Débat « Oratorium » à l'Université Quisqueya. Ce moment fort a été l'occasion de réunir des étudiants de diverses universités de la capitale, notamment l'Université Quisqueya, l'Université Notre-Dame, l'UEH et d'autres institutions académiques. Le thème du jour, « Comment les jeunes peuvent-ils travailler avec les gouvernements et les organisations de la société civile pour lutter contre la corruption et ses impacts négatifs sur la société ?», a soulevé des réflexions profondes et des discussions animées sur l'avenir du pays.
L'initiative d'Oratorium est bien plus qu'un simple club de débat ; elle représente un cri de conscience et un appel à l'action pour la jeunesse haïtienne. Dans un contexte où la corruption et les inégalités sociales sont des problèmes omniprésents, Oratorium se veut un vecteur de changement. Par ses discussions, il cherche à former une nouvelle génération de leaders capables de défier le statu quo et de participer activement à la construction d'une Haïti plus juste, plus transparente et plus prospère. Le rôle des jeunes est primordial dans ce processus. En s'engageant dans des débats constructifs et en s'unissant pour proposer des solutions réalistes, ils peuvent contribuer à redéfinir le futur du pays.
Ainsi, Oratorium s'impose comme un phare de lumière dans l'obscurité de la crise, un tremplin pour une jeunesse désireuse de briser les chaînes du passé et de prendre sa place dans la transformation de la société haïtienne. Le lancement de ce club est un signe de bravoure et de prise de conscience chez de nombreux jeunes universitaires, qui comprennent que, pour sortir Haïti de l'impasse, il leur faut agir, réfléchir et s'unir pour un avenir meilleur.
Une Cérémonie Riche en Enseignements pour la Jeunesse Haïtienne
La cérémonie inaugurale du Club de Débat Oratorium s’est déroulée sous la direction de Maître Emmanuel Antoine, présentateur, et de Rosevaldo Madius, modérateur. En l’honneur de notre bicolore, symbole de la liberté, l’événement a débuté par l’hymne national, La Dessalinienne. Ce moment marquant a été l’occasion de rappeler l’importance de notre héritage historique dans la lutte pour la liberté et la dignité du peuple haïtien.
L’activité a rassemblé de nombreuses personnalités influentes du milieu universitaire haïtien, dont le recteur de l’Université Quisqueya. Celui-ci a exprimé son enthousiasme à l’idée de voir Oratorium naître au sein de l’université, saluant cette initiative comme un moyen essentiel de stimuler la réflexion et l’action des jeunes. Il a encouragé la jeunesse haïtienne à continuer à échanger, à débattre et à proposer des solutions face aux défis de notre époque. Selon lui, un des grands manques dans notre société actuelle est le lien social, fondamental pour surmonter les crises que traverse le pays. Le recteur a également abordé le problème de la corruption, qu’il considère comme étant à un stade primitif mais susceptible de se dégrader davantage si aucune action n'est entreprise. Il a pointé du doigt la dégradation morale de certains acteurs de la société et a souligné que les institutions publiques, en particulier le système judiciaire et l’administration de la justice, sont des éléments clés de cette problématique. « L’appareil de l’État fonctionne comme une gigantesque organisation criminelle », a-t-il affirmé, appelant à une réforme urgente du système pour éviter l’effondrement total.
De son côté, le Directeur Général de l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC), Me Hans J.L. Joseph, a souligné la gravité de la situation en Haïti, qualifiant la corruption de phénomène « anormal » qu’il est crucial de combattre. Me Joseph a exprimé sa satisfaction quant à l’engagement des jeunes présents à l’événement, soulignant qu’ils représentent l’avenir du pays et une source d’espoir pour un changement significatif. Selon lui, Haïti traverse une crise multidimensionnelle, où une petite élite profite de la situation au détriment de la majorité de la population. Il a insisté sur le rôle incontournable des universités dans cette lutte, car elles sont les moteurs de la formation des consciences citoyennes et des futurs leaders du pays. Le lien entre le progrès social et l’université est fondamental pour avancer vers un véritable développement.
Le Directeur Général de l’ULCC a également souligné l’importance d’une gestion transparente et éthique des affaires publiques. Il a appelé les étudiants à raviver leur vigilance civique et à jouer un rôle actif dans la construction d’un discours public respectueux et constructif. « Voler l’État, c’est encore voler la nation », a-t-il averti, insistant sur la nécessité de dépasser les divergences politiques et de s’unir pour lutter contre ce fléau. Le message de Me Joseph a été clair : l'engagement des jeunes, notamment des étudiants, est essentiel pour rétablir l’ordre et la justice dans notre société.
Ainsi, ce lancement d' Oratorium a marqué une étape importante dans la prise de conscience collective sur la nécessité de repenser les fondements de la société haïtienne. Le club de débat se veut être une plateforme d’échange et de réflexion, où les jeunes universitaires pourront élaborer des solutions concrètes pour sortir Haïti de sa crise, en travaillant ensemble avec les acteurs de la société civile et les institutions publiques. L’engagement de l’ULCC et d’autres parties prenantes dans cette démarche prouve que la lutte contre la corruption ne se fera pas sans l’implication active de chacun.
Lutte contre la corruption en Haïti : Les appels à l'action de la jeunesse et la réforme des institutions
Les deux intervenants présents lors de la conférence ont brillamment développé le thème. Roudy Stanley Penn, ancien ambassadeur d'Haïti en Chine (Taïwan), politologue de renom, a consacré sa carrière à la promotion de la démocratie et à la professionnalisation de la vie politique en Haïti. Grâce à son expertise en conseil politique, il a conseillé de nombreux ministres et parlementaires sur des questions stratégiques. En 2017, il a fondé Politicotech, un cabinet de conseil en politique, qui a travaillé avec plusieurs institutions gouvernementales. Depuis octobre 2024, il est consultant à l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC), où il continue son engagement pour une gouvernance transparente et une meilleure intégrité institutionnelle. Il a particulièrement insisté sur l'importance de l'implication de la jeunesse, soulignant que ce n’est pas seulement dans les débats qu’ils doivent s’investir, mais aussi sur le terrain, en mobilisant les populations. Roudy Stanley Penn a également évoqué l’historicité de la corruption en Haïti, un fléau qui perdure depuis des décennies, et a encouragé la jeunesse à prendre les devants dans la lutte contre cette problématique.
De son côté, Me Louibenson Louis, avocat de l’ULCC, a souligné que l’un des principaux obstacles à la lutte contre la corruption réside dans l'inefficacité des institutions haïtiennes, qui n'appuient pas suffisamment les efforts de l'ULCC. Il a abordé le manque d’engagement des acteurs politiques et des responsables face aux rapports que l'ULCC produit. Plus de 40 rapports, selon lui, sont laissés sans suite par les autorités compétentes, ce qui empêche la justice de jouer son rôle. Il a donc insisté sur la nécessité d'une réforme du système judiciaire pour que les institutions puissent enfin remplir leur fonction. Me Louis a également souligné que l'engagement de la jeunesse est crucial, non seulement pour dénoncer, mais aussi pour exiger des changements profonds dans le système de gouvernance.
Lancement du Club Oratorium de l’Université Quisqueya : Un Débat Crucial sur la Lutte Contre la Corruption
Pour clôturer l'événement du lancement du Club Oratorium, un match de débat entre deux groupes a eu lieu autour du thème : « La jeunesse est-elle la clé pour déraciner la corruption ? » Un sujet particulièrement pertinent pour l’Haïti d’aujourd’hui. L’équipe en faveur de la jeunesse a brillamment défendu son point de vue, en soulignant que la jeunesse, avec sa vitalité et son potentiel d’innovation, constitue un moteur essentiel pour l’éradication de la corruption. Selon eux, ce sont les jeunes qui, par leur éducation et leur volonté de changement, pourront bousculer les normes établies et imposer un modèle de gouvernance plus transparent et plus responsable. Ils ont ajouté que la jeunesse est moins corrompue par les anciennes pratiques et qu’elle dispose de la créativité nécessaire pour construire une société plus juste.
En revanche, l’équipe contre a présenté un argumentaire solide en soulignant que, bien que la jeunesse joue un rôle crucial, la corruption en Haïti est profondément enracinée dans les institutions et qu’il ne suffit pas seulement d’avoir des jeunes volontaires pour que le changement se produise. Selon cette équipe, la lutte contre la corruption exige avant tout une réforme en profondeur des structures politiques, administratives et juridiques du pays, qui, si elles ne sont pas modifiées, freineront inévitablement les efforts des jeunes.
L’équipe gagnante, qui était celle en faveur de l’idée selon laquelle « la jeunesse est la clé pour déraciner la corruption », a brillamment remporté le débat. Bien que l’équipe adverse ait présenté des arguments solides et bien élaborés, l’équipe pour a su convaincre les juges par la clarté de ses propos et la force de ses convictions. Leur capacité à démontrer que les jeunes, par leur énergie et leur volonté de changement, jouent un rôle essentiel dans la lutte contre la corruption, a fait pencher la balance en leur faveur.
Les juges ont reconnu les efforts des deux équipes, mais ont souligné que l’équipe pour avait mieux exploité ses ressources pour persuader le public et les jurés. Cette victoire n’a pas seulement été le fruit de la préparation, mais aussi de la manière dont les arguments ont été articulés et soutenus avec passion.
Les juges présents, Stéphanie Sophie Louis, Gassendy Calice et Louisbenson Louis, ont apporté des critiques constructives et des conseils avisés aux débatteurs. Ils ont souligné l'importance de la manière de prendre la parole et de la posture, en insistant sur le fait que la clarté des arguments et la conviction étaient des éléments essentiels pour convaincre. Les juges ont reconnu que les deux équipes ont bien travaillé, mais ont encouragé les intervenants à renforcer encore leur éloquence et à ne pas se contenter des arguments évidents. Ils ont également recommandé une plus grande fluidité dans la transition entre les idées et un usage plus marqué des faits pour soutenir les opinions exprimées.
Ce débat a été un véritable succès et a souligné l'importance de l’engagement des jeunes pour le changement. La coordinatrice du Club Oratorium, Tayler Ansy N. T. Tassy LAZARRE, a exprimé sa gratitude envers tous ceux qui étaient présents et a encouragé la jeunesse à mettre de côté ses égaux pour se rassembler autour de la construction d’une nouvelle Haïti. Elle a rappelé que, pour sortir de cette crise, il est essentiel que chaque jeune prenne conscience de son rôle et s’engage activement dans la lutte contre la corruption.
Cette journée marquait non seulement le lancement d'un club de débat innovant à l'Université Quisqueya, mais aussi un appel à l’unité et à l’action des jeunes pour un avenir meilleur. La jeunesse haïtienne doit être au cœur du changement, et chaque initiative en ce sens est un pas de plus vers la transformation de la société haïtienne.
Philibob NOËL
Oratorium : Club de débat de l’Université Quisqueya