L'UniQ vole au secours des agriculteurs de la plaine des Cayes et de Torbeck

Gardy Saint-louis

Faculté des Sciences de l'Agriculture et de l'Environnement (FSAE) / Université Quisqueya
20/08/2021
Article


A l’initiative du MARNDR, l’UniQ vole au secours des agriculteurs dans la plaine des Cayes et de Torbeck. 

Avec environ 500 000 tonnes métriques consommées annuellement, le riz constitue la principale céréale consommée en Haïti, et l’une des principales composantes de l’alimentation du pays (plus de 45 kg consommé par habitant par année; 48e pays en terme de consommation par habitant sur 169; pour une moyenne mondiale de 53 kg par habitant). L’essentiel du riz consommé est importé,et  aujourd’hui plus de 400,000 tonnes métriques sont importées chaque année, ce qui constitue la première denrée alimentaire importée (près du double en dollar des importations d’huile, de blé, ou de sucre).L’augmentation de la production locale de riz est donc à la fois un enjeu de sécurité alimentaire et de souveraineté économique.

Haïti dispose environ de 46,000 hectares de terres irriguées dédiées à la production de riz tandis que le pays n’en produit que 120,000 tonnes métriques de riz décortiqué (Faostat 2019). Trop de terres restées en jachère à cause du manque d’eau en général, pour cause de canaux non curés, sont à la base de ce manque de productivité. Cette dernière par hectare est l’une des plus faibles au monde. Haïti devrait pouvoir facilement produire au moins 250,000 tonnes métriques de riz. 

Face à l’augmentation de la consommation de riz en Haïti, au poids de l’importation qui impacte lourdement la balance commerciale du pays, et aux problématiques de sécurité alimentaire, depuis 2008 (avec les émeutes de la faim) des investissements conséquents ont été réalisés pour augmenter substantiellement la production rizicole dans le pays. Des paquets techniques sont importés, développés et diffusés auprès des producteurs de riz dans les principales zones du pays, dont la vallée de l’Artibonite qui constitue le noyau central avec plus de 85% des superficies cultivées (USAID, 2015). Malgré ces efforts, des dizaines de millions de dollars dépensés, des dizaines de projets réalisés, des politiques de soutien aux intrants agricoles, les résultats sont loin de répondre aux objectifs escomptés. Le rendement reste faible et ne dépasse pas 2.9 tonnes (maximum) de riz paddy à l’ha (FAOSTAT 2019). Dans une démarche prospective, les scénarios des impacts du changement climatique, avec des cyclones de plus en plus intenses, des épisodes de sècheresse de plus en plus rudes, tendent à montrer que si rien n’est fait, la production rizicole peut diminuer significativement et occasionner d’autres émeutes de la faim comme celles de 2008. 

Face à ces enjeux, la recherche et l’innovation ont été interpellées pour expliquer les verrous technico-économiques et socio-institutionnels qui freinent le développement de la production rizicole. Des chercheurs ont mené différentes actions durant trois ans dans la plaine des Cayes et de Torbeck.Ils ont proposé des solutions et fourni des pistes d’adaptation aux impacts futurs du changement climatique (Boyer 2019) dans le cadre d’un rapport.  

Depuis plus de 28 mois, la Faculté des Sciences de l'Agriculture et de l’Environnement de l’Université Quisqueya entreprend des activités de recherche sur le développement de la filière rizicole dans le cadre du Programme d’Innovation Technologique en Agriculture et Agroforesterie (PITAG) du Ministère de l'Agriculture et du Développement Rural. Ce programme financé par la Banque Interaméricaine de Développement (BID) consiste à accroître la production rizicole.  

Dans la première démarche de ce travail, une étude exploratoire a été réalisée par le docteur James Boyer et l’agronome Charles Jean Rigaud dans le but de faire un diagnostic succinct du système de production rizicole et du système-acteurs qui influencent les processus d’innovation de la filière du riz au niveau de la plaine des Cayes. Ce travail a donné une vision descriptive de cette zone, actualisé les données de terrain, proposé des hypothèses de travail et des pistes d’amélioration. En moins d' 1 an, les activités de recherche ont commencé à porter fruit, des pistes de solution ont été identifiées.  

Selon les chercheurs de l’université Quisqueya dont Charles Jean Rigaud, les problèmes de la densité de repiquage, la rareté de la main-d'œuvre agricole, de fertilisation, le mauvais contrôle de l’eau, les maladies fongiques comme l’helminthosporiose, la pourriture des graines, la Clavicularia représentent les principales contraintes de la production rizicole. Les chercheurs ont découvert également que la majorité des insectes ravageurs présents sur les parcelles tels que les punaises entrainent une baisse considerable du rendement de riz. 

Pour augmenter la productivité du riz, les chercheurs de l'Université Quisqueya, comptent utiliser toutes les technologies nécessaires pour changer la donne. Ils entendent introduire dans la plaine des Cayes de nouveaux paquets techniques incluant de nouvelles variétés résistantes à haut rendement tout en optimisant la densité de repiquage et le niveau de fertilisation.

De nouveaux opérateurs de machinerie agricole pouvant offrir des services de repiquage mécanisé,ou pour toutes autres technologies liées à la mécanisation développées, seront introduits pour effectuer le travail du sol, expliquent les chercheurs. Dans la plaine des Cayes et de Torbeck, les agriculteurs disent faire face à un problème de main d’œuvre, les jeunes pratiquent d’autres activités comme le taxi-moto. Cette situation a causé l’augmentation des prix de la main-d'œuvre déplorent t’ils. Le sous-programme vise l’augmentation de la production du riz irrigué. Les chercheurs, de leur côté,mettent les bouchées doubles afin d’augmenter la production du riz irrigué dans la plaine des Cayes et de Torbeck.Puisque les résultats des  premiers essais chercheurs de l’UniQ ont montré qu’en jouant sur un nombre limité de paramètres, à savoir la variété, la  densité optimale et la fertilisation adéquate, il est envisageable d’obtenir un gain de rendement de plus de 1.5 tonne à l’hectare dans la plaine des Cayes.

La recherche et le développement de nouvelles filières réhabilitent l'espoir des agriculteurs et autres professionnels qui œuvrent dans le domaine de la production du riz en Haïti. Les chercheurs de l'Université Quisqueya offre donc une autre alternative viable permettant de dynamiser le secteur en particulier et l'économie nationale dans son ensemble.

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Domaine(s) de Recherche: Agriculture

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